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Danser !

Une fois n’est pas coutume, je souhaiterais vous donner à lire l’intervention de Thibaut de Saint-Maurice dans l’émission LA PETITE PHILO sur France Inter le 05 février 2020.
Il est question de mouvement, de danse,  et d’émotions…

« Pas facile d’exprimer ses émotions, non seulement quand on est jeune mais quand on grandit, qu’on change et qu’on devient adulte. Pas facile parce qu’une grande partie de l’apprentissage que nous faisons en grandissant consiste précisément ou bien à taire l’expression de nos émotions pour pouvoir correspondre à des sortes d’idéaux sociaux de genre et de maturité : ces standards selon lesquels « les hommes ça ne pleure pas », « les femmes ça reste calme, doux et silencieux, sous peine d’être traitées d’hystérique… ». 

Plus nous grandissons, plus l’enfance s’éloigne et plus nous sommes poussés à nous déconnecter de nos émotions pour faire la place à un idéal de maîtrise de soi et de rationalité….

Si vous ajoutez à cela le fait que le langage que nous apprenons aussi en grandissant, est toujours trop général pour exprimer la singularité de nos émotions personnelles, il n’est pas étonnant que nous soyons devenus les propres geôliers de nos émotions….

Comment libérer les émotions et parvenir à les exprimer ? 

En prenant une bonne grosse dose de Nietzsche ! Pourquoi ? Parce que toute la philosophie de Nietzsche est un renversement des valeurs et des principes de cette éducation bourgeoise qui refuse justement aux émotions, la liberté de leurs expressions. Pour Nietzsche, il faut dès le départ « suivre le fil conducteur du corps » comme il dit. Or les émotions sont des états du corps, des changements d’état qui traversent nos corps et dont nos corps sont donc les témoins…

Et puis dans émotions, il y a motion, il y a donc le mouvement, ce qui nous émeut, nous meut – pas facile à dire 😉 – Et si l’on continue donc à suivre ce « fil conducteur du corps », ce qu’il faut libérer, ce qu’il faut exprimer c’est donc ces mouvements de notre corps traversé d’émotions : les frissons, les battements du cœur, les papillons dans le ventre, les tremblements, les larmes, la fatigue soudaine, la gorge qui se noue ou la boule au ventre. 

Alors le traitement que Nietzsche applique à la vie consiste à la faire danser. Il le dit d’ailleurs très clairement : 

Et que chaque jour où l’on n’a pas dansé au moins une fois, soit un jour perdu pour nous

Pas la peine donc de chercher des mots, de trouver des techniques compliquées, il faut danser nous dit Nietzsche, parce que la danse est une présence à soi et à son corps, parce qu’en dansant on exprime la matière même des émotions qui nous traversent. On extériorise sans intermédiaire.

Comment on fait pour « danser tous les jours » ? 

Il y a plein de manières différentes de danser : dans sa cuisine, sous la douche, avec des amis le soir. Mais la danse ça commence bien plus simplement :  avec le mouvement inattendu, la caresse, le câlin, se mettre en boule sur son lit, ou au contraire sauter de joie, sourire largement, déployer sa gorge pour rire ou au contraire sentir ses larmes couler, prendre l’escalier pour une fois, faire un détour, s’asseoir autrement, tout cela c’est danser, parce que tout cela tire de nous des mouvements qui déconstruisent nos mouvements et nos postures acquises, fonctionnelles et ternes là où toutes ces petites danses du quotidien disent clairement  dans quel état nous sommes.

Apprenons donc à lire les motions de notre corps et exprimons les en mettant davantage de danse dans la vie ! «  (Thibaut de Saint-Maurice)

Source : https://www.franceinter.fr/emissions/la-petite-philo/la-petite-philo-05-fevrier-2020

Quelques livres … 
Je danse donc j’existe : https://www.albin-michel.fr/ouvrages/je-danse-donc-jexiste-9782226316226
Danser, une philosophie : https://livre.fnac.com/a11274848/Julia-Beauquel-Danser-une-philosophie
La danse des 5 rythmes : https://www.psychologies.com/Bien-etre/Forme/Sports/Articles-et-Dossiers/Les-5-rythmes-une-danse-introspective